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C. Posier, Ecolomic : « L’essence même d’Ecolomic, c’est le local »

Publié le 23 juillet 2021

Clément Posier, CEO d'Ecolomic nous explique les enjeux des circuits-courts aujourd'hui

A l’occasion de son colloque « Nouveau consommateur, nouvelles supply chains » en avril dernier, Bretagne Supply Chain recevait Clément Posier, CEO d’Ecolomic. L’occasion d’évoquer avec lui l’année si particulière que nous avons traversé et les projets de la start-up pour répondre aux nouvelles attentes des consommateurs.

Bretagne Supply Chain : L’histoire d’Ecolomic a débuté dans un Super U que vous gérez, alors qu’il vous reste des paquets de lessive sur les bras…

Clément Posier : Je travaille en famille avec mon père. A l’époque, nous avions une problématique sur le compte de résultat, avec une trésorerie immobilisée. C’était une promotion de lessive qui n’avait pas fonctionnée. Nous avions des palettes qui restaient en réserve et nous ne savions pas quoi en faire. Nous avons donc cherché une solution. Nous avons monté un site e-commerce pour traiter cette problématique pour vendre en ligne les produits à tarifs réduits.

BSC : Ecolomic était né. Comment cela fonctionnait-il ?

C.P. : Au début, la question était la suivante : est-ce que des consommateurs sont prêts à faire du déstockage en ligne ? Et surtout : est-ce que ça peut générer du trafic en magasin ? Le résultat a été très positif ! Nous avons donc dupliqué le système sur un deuxième magasin. L’idée a fonctionné aussi bien en zone rurale qu’en zone urbaine. En voyant que le concept plaisait n’importe où, nous avons un peu réorienté l’idée de départ. L’objectif, c’est de proposer aux industriels, aux coopératives et aux grossistes du territoire de bénéficier de ce service.

BSC : Aujourd’hui, Ecolomic vise les produits destinés à être jetés ou détruits…

C.P. : Oui en effet. Il y a plusieurs portes de sorties pour ces produits. Même s’il reste aujourd’hui peu de destruction, il en reste alors que cela peut être donné aux associations. Chez Ecolomic, nous nous concentrons plutôt sur la partie qui est déstockée, donc envoyée vers des acteurs privés. Cela peut être envoyé sur les circuits comme Rungis ou des déstockeurs privés qui peuvent avoir des réseaux de magasins pour écouler ces produits.

BSC : Cela n’existe-t-il pas déjà ?

C.P. : Le destockage en ligne n’existe pas forcément sur l’alimentaire. Historiquement, nous avons des entreprises, comme Ventes Privées, qui ont démocratisé le concept au début des années 2000. Mais, sur l’alimentaire, il n’y a pas forcément d’initiatives. En tout cas, pas d’initiatives avec une boucle locale.

BSC : Vous avez fait une phase de test en magasin. Quel a été le bilan ?

C.P. : Le bilan a été très positif. Les consommateurs ont tout de suite répondu présents. Nous avons proposé du Click&Collect et de la livraison sur la première phase et nous nous sommes recentrés sur le Click&Collect pour la deuxième pour deux raisons : la livraison rejette du CO2, et nous avons prouvé, sur ce test, que la génération de trafic en magasin fonctionnait.

BSC : Cette phase de test vous a permis aussi de définir deux typologies de clients…

C.P. : Tout à fait. La première communauté est celle des « chineurs », ceux qui fragmentent leur consommation et font en fonction des prospectus, des promotions, des choix de consommation… La deuxième communauté que l’on a identifiée est celle des consommateurs « engagés »C Ce sont des consommateurs qui peuvent aller dans les AMAP, dans les circuits-courts, au marché et qui viennent pour des familles de produits spécifiques. J’ai en tête l’exemple d’une consommatrice qui m’a dit : « moi je reviens chez vous parce qu’il y a des fruits et légumes abîmés et que ça a du sens aujourd’hui d’acheter ses produits-là ».

BSC : Les légumes et les fruits « moches » font partie du « Top 3 » des produits que vous proposez et qui partent très bien en ligne.

C.P. : En « Top 1 », nous retrouvons notre fameuse lessive, mais il y avait un gros décochage prix. En « Top 2 », les gâteaux bretons. En Bretagne, les consommateurs ont profité de ces offres sur les gâteaux qui pouvaient être soit cassés, soit avec une DLC qui approchait. Et le « Top 3 », ce sont les fruits et légumes moches.

BSC : Ecolomic est né dans la région brestoise et vous êtes aujourd’hui soutenus par les pouvoirs publics…

C.P. : Nous avons eu la chance d’être accompagnés par la Région Bretagne avec des dispositifs d’aides. Nous sommes aussi accompagnés par un organisme privé du Crédit Agricole. Nous essayons de monter des groupes de travail, à l’image de ce qui est en place sur la Métropole de Rennes. A Brest se développe un projet agricole territorial. Nous rentrons dans ce cadre. Demain, nous pourrons avoir des industriels ou des coopératives avec des invendus ou des produits déclassés, qu’ils vont pouvoir proposer à des collectivités ou à des consommateurs qui habitent sur les métropoles.

BSC : Votre projet vise à couvrir un territoire, pour l’instant le Finistère.

C.P. : C’est le principe différenciant chez nous aujourd’hui. L’essence même, c’est le local. Les invendus qui sont sur le territoire sont proposés à des consommateurs qui, eux-aussi, sont sur le territoire. Nous proposerons de les retirer dans des magasins de proximité. Nous sommes sur cette boucle avec la volonté de travailler à l’échelle du département. Notre premier objectif, c’est le Finistère.

BSC : Quel serait votre rêve ?

C.P. : Nous lançons bientôt notre entrepôt. L’idée, c’est de pouvoir avoir différents marchands, coopératives ou industriels du Finistère Nord, qui puissent proposer leurs invendus sur la plateforme. Une vraie dynamique serait créée, tant avec des entreprises qui ont des invendus, qu’avec des communautés de consommateurs qui se retrouvent dans cette démarche.

BSC : Et ces points relais seraient les grandes et moyennes surfaces ?

C.P. : L’idée c’est de pouvoir s’appuyer sur des magasins U, Intermarché ou Leclerc en prenant en compte qu’il y a des flux de clientèle qui vont déjà vers leurs Drives. Nous profitons de ce flux pour ramener les clients vers des endroits dans lesquels ils se rendent et éviter encore une dispersion.

BSC : Avez-vous trouvé votre modèle économique ?

C.P. : Tout à fait. Notre business model est basé sur un pourcentage de commission. Nous sommes une marketplace. Nous avons donc adopté ce modèle. Le pourcentage varie en fonction des catégories de produits car il n’y a pas les mêmes impacts, la même logistique sur des fruits et légumes ou sur les produits industrialisés. Nous nous adaptons. Aujourd’hui, nous sommes sur une logique de co-construction avec différents acteurs du territoire qui travaillent sur la fixation des taux de marges par catégorie.

BSC : Comment fait-on pour les produits frais ? Avez-vous déjà mis en vente des produits, des fruits ou des légumes qui arrivent à date ?

C.P. : Aujourd’hui, l’enjeu est de pouvoir répondre à trois types de produits : le sec, le frais et le surgelé. Le véritable enjeu sur le frais est que nous n’allons pas nous battre sur la fin de cycle de vie du produit. Chez Ecolomic, nous nous sommes recentrés sur l’enjeu des contrats dates. Il y a des produits qui seront à 19 jours, et qui sont acceptés dans le circuit de distribution classique. Nous nous intéresserons plutôt à cette frange-là de la partie DLC. Une fois ce choix fait, l’enjeu est de garantir le plus de date possible au consommateur. L’idée, c’est d’avoir un maillage d’entrepôts. Le premier sera inauguré dans le Finistère Nord. C’est un entrepôt qui a vocation d’aller vers les magasins d’un certain territoire. Ainsi, nous raccourcissons les chaînes logistiques pour garantir de la fraîcheur optimale. 

BSC : Existe-t-il d’autres enjeux sur la partie anti-gaspillage alimentaire ?

C.P. : Si je prends l’exemple des fruits et légumes bio, il y a forcément des produits qui seront déclassés parce qu’un peu difformes. Ces produits peuvent aujourd’hui rester dans le champ : ils ne sont pas récoltés. Nous proposerons un produit bio, peut-être moins cher, avec des chaînes d’approvisionnement locales. Nous avons de grosses coopératives dans le Finistère Nord qui se dirigent vers le bio. Cela constitue un enjeu. Les gammes « normalisées » pourront rejoindre les circuits classiques et nous pourrons proposer une autre gamme dans les cantines du territoire justement avec du bio déclassé. A ce moment-là, nous touchons le local, l’anti-gaspi et le petit prix : ce sont les trois fers de lance d’Ecolomic.